Répartition


[En date du 22/04/2004]

 L es divers partis politiques et plus largement les divers groupes qui réfléchissent à l'organisation de la société sont tous d'accord quant à la manière générale dont elle doit être organisée, et qui consiste en ceci: une petite partie des membres de la société doit être dépositaire de la plus grande partie du bien social; ils se divisent seulement sur qui: la tendance «communiste» dit que ça doit être la structure d'État; celle «libérale» dit que ça doit être les opérateurs privés; celle «socialiste» considère que les dépositaires de ce bien social doivent être à-peu-près également structure d'État et opérateurs privés; celle «fasciste» considère qu'il doit être entre les mains des «vrais nationaux». Il existe bien certains penseurs de la société qui n'ont pas d'opinion sur la question, ou considèrent que le bien social doit être également réparti entre ses membres, ou ne doit être détenu par personne, mais ils sont rares. Toujours est-il, l'analyse commune est qu'une part restreinte du corps social doit avoir la libre disposition du bien commun. J'en conclus qu'il doit y avoir moyen de concilier les diverses approches. Et selon moi, la voie «socialiste» me semble la plus intéressante, car la plus équilibrée.


La voie socialiste, c'est, «à chacun selon ses besoins»; les particuliers ont tous à-peu-près les mêmes besoins, il serait donc intéressant d'évaluer le «besoin moyen» et de répartir la part du bien social qui couvrirait ce besoin moyen entre tous les membres de la société. C'est ce à quoi s'attachent plusieurs mécanismes mis en place en France depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, qui me fait dire que fonctionnellement ce pays est «socialiste» depuis 1945 environ, quelle que soit la tendance politique affichée des gouvernements et des majorités parlementaires qui s'y sont succédés. Ces mécanismes sont divers: salaire minimum, indemnités de chômage, accession à la propriété, revenu minimum, allocations diverses (famille, logement, etc.). Les choses ne sont bien sûr pas si simples, dans les faits, «les besoins moyens» ça n'existe pas: selon l'endroit où l'on vit, ses activités, et bien d'autres critères, on n'a pas strictement les mêmes besoins. Cela dit, nous avons des outils intéressants, notamment l'INSEE, pour déterminer assez finement quels sont les besoins moyens pour chaque individu.

La structure d'État — gouvernement, administrations, services et entreprises publiques — doit prendre en charge deux domaines principaux: les infrastructures et les services de régulation de la société. Ce qui ne signifie pas qu'elle doive elle-même les mettre en œuvre, mais du moins c'est à elle d'opérer la répartition des biens et des moyens en vue d'une mise en œuvre optimale de ces deux domaines. En résultante, toute la part du bien social qui ne pourvoit pas aux besoins des individus et qui n'est pas nécessaire au bon fonctionnement du domaine public est à libre disposition des opérateurs privés. Les deux questions qui se posent me semblent: comment s'assurer que la part «non disponible» ne soit pas accaparée injustement par les opérateurs privés, et comment s'assurer que la structure d'État emploie au mieux les biens et moyens à sa disposition.