|
|
|
Qui aime payer des impôts ?
|
|
 |
Commencé le 15/08/2002.
Moi. Enfin, ça me ferait plaisir, de payer taxes et impôts, si je savais qu'on
les utilise à bon escient. Ce qui n'apparaît pas toujours évident.
Un exemple parmi bien d'autres: la PAC, ou Politique Agricole Commune. Elle part
de deux bonnes volontés, pour arriver à deux problèmes directs et quatre indirects.
Au départ, la PAC visait à obtenir deux résultats qu'elle a, d'une certaine manière,
obtenus: assurer l'auto-suffisance alimentaire de la — à l'époque —
Communauté économique européenne, et assurer un revenu minimum aux agriculteurs
et aux éleveurs, disons, aux paysans.
D'une certaine manière, mais laquelle ? Celle-là même qui amena les quatre
(principaux) problèmes évoqués. L'assez mauvaise idée fut d'attacher le revenu, non
à l'exploitation, mais à la production. Premier problème direct, ça favorisa —
et ça favorise toujours — l'agriculture la plus productiviste, les paysans
s'attachant dès lors à améliorer la quantité, au détriment bien sûr de la qualité;
second problème, ça favorisa les gros producteurs (à l'heure actuelle 80% des
subventions vont vers 20% des producteurs), induisant la disparition inéluctable
des plus petites exploitations et l'agrandissement indéfini des grandes. On pourra
me dire, pourquoi pas ? Je dirai, parce que tant qu'à financer l'agriculture,
autant soutenir le maximum de personnes possible pour le même budget: dans ces
histoires de subventions, il ne s'agit plus de récompenser à son juste prix le
travail fait, on crée une «rente de situation», indépendante de la valeur sociale
de la production rétribuée. Ce qui nous amène aux quatre problèmes «indirects»: la
surproduction, la pollution, les subventions à l'exportation et l'importation de
produits agricoles compétitifs.
Les deux premiers problèmes sont liés, et pour le contribuable européen, sont
les plus visibles dans leurs impacts immédiats; mais ils ont des conséquences
«invisibles» — en réalité, visibles, mais qu'on n'associe en général pas aux deux
premiers en tant que conséquences de la PAC.
La surproduction n'est pas, comme l'on croit souvent, quelque chose de voulu par les
institutions européennes; par contre, elle fut souhaitée par la quasi-totalité des
gouvernements français, portugais, espagnols, italiens, et qu'ils souhaitent encore. Non
pas en soi, mais par leur volonté de ne pas voir réformer la PAC pour des raisons
clientélistes, ou que sais-je, en tout cas pas des raisons électoralistes, comme on le
dit, en ce sens qu'avec une politique garantissant le revenu des agriculteurs, et non la
rémunération de la production, ils amélioreraient considérablement le sort des 80%
d'agriculteurs profitant peu ou pas du tout des subventions européennes, cela pour un
coût moindre qu'avec la politique actuelle… Pour être cynique, je dirai que si
un gouvernement a plus intérêt à aider le maximum de personnes, les membres de ce
gouvernement ont plus intérêt, en tant que membres d'un parti, à ce que l'argent soit
concentré entre les mains de quelques généreux donateurs. Savoir si c'est moi ou le
politicien faisant ce calcul, le cynique…
La pollution est une conséquence de la concentration. Si vous parcourez le territoire
français, vous découvrirez cette chose incroyable: un pays pur, des ondes claires, des
prairies riantes, une douceur de vivre sans pareille. Tout du moins, sur 80% de sa
superficie. Et sur les 20% restants, de la surpopulation, des automobiles, des camions,
des tracteurs, des bennes et tous autres véhicules automobiles, des usines à tout, dont
des «usines à viande», ou plus poliment des exploitations agricoles industrielles, ce qui
indique tout. C'est bête à dire, si vous mettez vos bestiaux à chier et pisser un peu
partout, ça se répartit, ça se résorbe, ça se dilue, mais si vous les entassez en un même
point, leurs excréments font des gros tas qui ne veulent pas disparaître. Conclusion:
diminuez les subventions aux gros agriculteurs de 80%, répartissez cette somme sur les
80% de paysans restant, et ils pourront agrandir leur exploitation au double de celle
actuelle, ce qui fera des exploitations cinq à six fois plus petites que les plus grosses
et répartira les déchets sur tout le territoire. Exemple: le lisier qui se concentre en
Bretagne fait monter le taux de nitrate à deux fois le maximum tolérable: en revanche, le
niveau de nitrates en Auvergne est proche de zéro: si vous prenez 10% de ce lisier en
Bretagne pour le mettre en Auvergne, le niveau de nitrate sera toujours proche de zéro,
et en Bretagne à 40% au-dessus de la norme; refaites le truc dans le Limousin, le taux
en Bretagne n'est plus qu'à 30% de la norme, etc. Conclusion, pour régler le problème du
lisier breton, il suffit de répartir le revenu agricole plus intelligemment.
Il peut sembler aberrant de subventionner à la fois la production et la vente. Et en
effet, ça l'est. Qu'est-ce qui se passe ?
|